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CHAPITRE PREMIER

Les jours d’été étaient revenus, ma mère s’était rendue à la campagne dans une propriété qui nous appartenait depuis peu.

Mon père était resté à la ville pour s’occuper de ses affaires. Il regrettait d’avoir acheté cette propriété sur les instances de ma mère : « C’est toi qui as voulu cette maison de campagne, disait-il, vas-y si tu veux, mais ne me force pas à y aller. D’ailleurs, tu peux être certaine, ma chère Anna, que je vais la revendre dès que l’occasion s’en présentera.

— Mais mon ami, disait ma mère, tu ne peux pas te figurer comme l’air de la campagne fera du bien aux enfants…

— Ta, ta, ta, répliquait mon père, en consultant un agenda et en prenant son chapeau, je t’ai passé cette fantaisie, mais j’ai eu tort. »

Ma mère était donc partie à sa campagne, comme elle disait, dans l’intention de jouir le plus rapidement et le plus complètement possible de ce plaisir momentané.