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bien : « Elles couchent aussi dans la même chambre, tu me comprends. »

Ma sœur rougit fortement en gardant le silence.

« Il ne faut pas te gêner, Élise, dis-je amicalement, je ne suis plus un petit garçon. Tu as pu d’ailleurs remarquer quand on nous baignait ensemble lorsque nous étions plus petits, que mon vit n’est pas plus mal que celui de ton Frédéric.

— Mais Roger !

— Nous avons maintenant du poil entre les jambes et nous savons qu’il y a quelque chose de mieux que de jouer au doigt mouillé ou à cinq contre un. »

Élise était toute rouge, sa poitrine se soulevait, mais elle ne savait quoi répondre. Brusquement, elle regarda si personne ne nous voyait et demanda :

« Est-ce vrai, Roger, que les jeunes gens avant d’être soldats doivent se mettre nus et se laisser regarder. J’ai entendu maman et ma tante dire quelque chose comme ça, et on en parlait aussi à la pension.

— Frédéric, mon beau-frère futur, aurait pu te dire ça. Naturellement, ils le doivent. On les regarde comme une fiancée pendant la première nuit de noces. Mais ils ne bandent pas, parce qu’ils ont peur. Frédéric non plus ne devait pas bander.

— Va donc… ! Mais ils doivent avoir