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et s’était laissée emmener là-bas dans un des premiers convois qui amenèrent d’Europe de nouveaux fidèles. Mon grand-oncle, Otto Mahner, a passé là-bas son enfance et n’est rentré dans son pays natal qu’à l’âge de vingt-cinq ans, pour se marier à la façon européenne, mais il ne cesse de me parler du mormonisme, depuis que je le revois. Il y revient toujours en parlant comme d’un moyen de redonner à la France la population dont elle a besoin pour rester une grande nation. »

« Mais, dit Elvire, croyez-vous que ce soit utile qu’il y ait beaucoup d’enfants ? »

« Fichtre ! dit Ovide. Si c’est utile ; mais dans cinquante ans il y aura cent millions de Boches, soixante millions d’Italiens ; je vous fais grâce des Espagnols et autres nations qui confinent à la France et, du train où l’on va, elle n’aura pas atteint à cette époque son quarantième million. »

« Ce serait rigolo, dit Elvire, que votre grand-oncle ait connu ma grand’mère. »