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fille, en robe à panier, avec un tablier, coiffé d’un bonnet, chaussée de souliers à haut talon, la gorge provoquante et décolletée, la taille très fine, semble repousser en riant les propositions d’une dame d’âge mûr, robe à falbalas, double menton, yeux égrillards, qui tente de la persuader.

Cet exemplaire se trouvait, vers 1860, dans la Bibliothèque du comte de La Bedoyère. Outre les exemplaires complets ou incomplets qui figurent à l’Enfer de la Bibliothèque Nationale (voir 196, 493, 494, 495, 496), on n’a signalé qu’un autre exemplaire de l’Anti-Justine, en demi-reliure, mais non rogné, qui, après avoir appartenu à M. Armand Cigongnes, fut compris dans la vente de ses livres au duc d’Aumale, et fut cédé à un riche Anglais demeurant à Paris (sans doute, M. Henkey), qui l’acquit pour 2.000 francs. Cet exemplaire est aujourd’hui aux États-Unis.

M. B. de Villeneuve dit — « Il faut constater… que ces trois exemplaires incomplets, qui sont conservés dans l’Enfer de la Bibliothèque nationale, proviennent de la saisie opérée en 1803, chez les libraires du Palais-Royal et dans les maisons de prostitution, par ordre exprès du Premier Consul, qui décida que deux exemplaires de chaque ouvrage libre resteraient déposés, et sous clef, à la Bibliothèque… et que tous les autres seraient détruits et mis au pilori. Ce sont les trois ex. : nos 494, 495, 496). »

Il y a de l’Anti-Justine (1863, 2 vol. in-16) une réimpression tronquée en 2 vol. in-12, ornée de mauvaises lithographies, où l’on a falsifié et même supprimé les passages impies du livre. On a aussi donné en 1864, une réimpression sans suppressions, et parmi d’autres réimpressions récentes il y en a une, conforme à l’édition de 1798 (Imprimerie Edwards Keene and Co London), pleine de fautes d’impression (pet. in-8o de 395 pages, couv. imprimée).

Celui qui a lu Monsieur Nicolas n’a point de peine à retrouver dans l’Anti-Justine un supplément à cet ouvrage, supplément délirant et d’une obscénité inouïe. C’est un livre unique, le plus fou, le plus étonnant et le plus écœurant qui soit. Rien de plus triste que cette production où les beautés ne manquent point, mais qui témoigne d’un cerveau déréglé, d’une imagination insensée. La réimpression moderne orthographie Guac le nom d’un personnage de l’Anti-Justine, travestissant et rendant méconnaissable un des anagrammes les plus faciles à deviner dans ce livre. L’exemplaire