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HISTOIRE DE Mlle BRION

pas la venir manger avec moi : c’étaient eux tous qui m’entretenaient, et tous jouissaient des droits d’un entreteneur ; tous rivaux heureux et trop amis pour ne pas partager les mêmes plaisirs. Je ne remarquai jamais entre eux aucun procédé désobligeant : aussi d’accord dans leur bonheur que tous portés à faire des folies, il ne nous passa point une idée dans la tête, si extravagante et si folle qu’elle fût, que nous n’exécutâmes. Peignez-vous, madame, tout ce que peut imaginer une fille libertine à l’école de cinq ou six pages.

Un jour de messe de minuit, ils me proposèrent de courir les églises habillée en page. Qu’une fille a d’esprit sous cet habit ! il n’est point de malice qu’on ne m’eût appris et point d’étourderie dont je ne me sentisse capa-