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viduellement leurs luttes personnelles ; ils se disputent entr’eux, non précisément les éléments de l’existence la plus stricte, ni les ressources d’alimentation et d’abri, nécessaires à la vie, mais l’éclat de l’opulence et la grandeur.

En effet, ces dissensions et ces disputes ne sont point celles des pauvres habitants des campagnes ; ce n’est ni pour lutter contre les rigueurs de l’hiver, ni contre les vents des Cordillières, ni pour arracher une maigre nourriture au sol ingrat des montagnes. Il en est pour eux, comme de ces querelles domestiques, qui s’élèvent entre gens bien nés, entre familles aristocratiques et puissantes, à qui ne suffisent point le bien être dans lequel elles vivent, non plus que les richesses amassées par leurs aïeux, car leur aspiration n’a pour but qu’une satisfaction d’orgueil, qu’une exaltation de pure vanité.

Le high-life des forêts, comme les courtisans des grandes cours européennes, passe sa vie à faire les efforts les plus énergiques et à employer tous les moyens, pour recevoir le rayonnement direct du souverain, pour que les sourires et les regards protecteurs de la puissante majesté s’arrêtent à tout moment sur eux avec bienveillance.

Le souverain, que, par comparaison, je viens de donner aux plantes des bois, c’est le soleil : et veuillez croire que cette image est l’expression la plus parfaite et la plus naturelle de la réalité. C’est que les épaisses forêts des régions intertropicales, tout en possédant, dans l’air et dans le sol, tous les éléments de grande vitalité végétative, renferment, de par leur nature même, certain empêchement, je dirais presque un obstacle au développement des plantes dont le feuillage ne peut dépasser le niveau supérieur de