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les refaire d’après les anciens fondements, sur lesquels on ne peut bâtir que ce qui y avait été bâti. Sur ce fondement, il serait facile de s’entendre (sur l’union des églises), ce qui sera impossible tant que l’on ira à l’aventure.

Parce que si les seigneurs de ce monde ne se fâchent pas de ces propos violents, je ne sais si le Seigneur céleste ne sera pas courroucé. Car trop souvent les avril et mai du nouveau calendrier au lieu de verdir se recouvrent entièrement de blanc. Ce que voyant et pesant, le cœur se serre et Dieu seul sait si de pires malheurs ne nous attendent pas encore.

Comme on le voit, peu de bien a résulté de ces corrections, mais un désordre étrange s’est emparé du monde chrétien, non seulement dans les affaires de l’église, mais aussi dans les faits et gestes du monde. Beaucoup de querelles et de haines ont commencé par là, traînant après elles des misères et des pertes inutiles pour des gens qui n’en peuvent mais. Le pauvre infortuné qui gagne son pain du travail de ses mains et à la sueur de son front, qui doit en vivre et est obligé de donner de ce travail et de cette sueur au seigneur foncier ce qui sera exigé de lui, était habitué comme ses pères à rendre au seigneur ce qui revenait au seigneur et à Dieu ce qui revenait à Dieu. Maintenant, il ne peut joindre les bouts d’aucune manière. Le seigneur lui ordonne de travailler les jours consacrés à Dieu et qui lui sont réservés d’après les anciennes coutumes de l’église. Il craint Dieu, mais aussi il craint son seigneur : il doit abandonner le plus grand pour servir le plus petit. Car il a entendu dire du premier qu’il est très patient et miséricordieux et il sait que le second est très peu patient et qu’il ne fait guère grâce. S’il ne le sent pas sur lui-même, sûrement son bœuf s’en ressentira, lorsque vient le jour férié reconnu par son seigneur, il voudrait bien travailler pour soulager sa propre indigence, mais il craint son maître et doit abandonner le travail. Dans ces conditions, il oublie souvent et le jour férié du maître et celui de Dieu, de sorte qu’il a souvent tort envers Dieu et envers le seigneur et toujours envers lui-même. Au dehors la vermine le ronge, au dedans sa conscience l’inquiète. Et ne pouvant rien changer à son malheur, il se console par des soupirs, des plaintes, des larmes et, peut-être, en maudissant son sort et le réformateur du calendrier. Il ne faut point se moquer de lui, parce qu’il n’est pas habillé de pourpre et qu’il n’est pas savant. Car le Seigneur qui voit la fierté des cœurs, balaie sou-

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