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ANTÉE

Nous dirons donc, une fois de plus, qu’Antée ne sert ni un dieu littéraire, ni même la politique d’un ou l’autre littérateur. Il tâche de servir la bonne littérature, tout simplement, en publiant des œuvres nouvelles et — posant en principe qu’il n’y a parmi ses lecteurs aucun sectaire ni aucun imbécile — les avis les plus contradictoires, pourvu que courtoisement exprimés, sur toutes les questions intéressantes. C’est ainsi que vous avez pu y lire, alors que son respect pour les œuvres admirables des symbolistes, sa reconnaissance pour les services qu’ils ont rendus à la poésie, sont évidents, et après l’étude admirative, du livre de M. de Souza, par M. Maurice Wilmotte, une chronique de M. J. Ernest Charles où il était conseillé de combattre sans pitié le symbolisme. Eh ! croyez vous que ces belliqueuses paroles du spirituel critique un naturiste les eût signées ? Et était ce une rose sans épines qu’il offrait à M. Saint Georges de Bouhélier ? D’autre part est-il rien de plus fastidieux et de plus inutile qu’un panégyrique par un compère, et n’est il pas agréable de pouvoir entendre dans le même clocher le son de différentes cloches ? Quand nous invitons un bon écrivain à collaborer à Antée , nous ne lui assignons aucune limite, nous ne lui faisons aucune défense, pas même d’égratigner les œuvres ou les hommes qui nous sont le plus chers. Nous sommes tous vers libristes et nous publions la prose de M. Moréas où il dit que le vers libre l’a désenchanté. Nous ne la publions pas seulement parce que son auteur est un poète admirable, ou parce qu’elle est d’un tour charmant, mais parce qu’elle apporte au débat, où, comme partout, la vérité ne peut manquer de triompher, l’avis précieux d’une des plus nobles intelligences du temps. Nous eussions publié l’abraca­dabrante lettre de M. Vanlerberghe… où il se massacrait lui même ! et dans le numéro suivant, eût fait d’autant plus plaisante figure l’article de M. de Souza au sujet de cette lettre. Nous ne demandons à chacun que de la civilité et de