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JOURNAL DES LIVRES
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Si le génial poète du Livre de la Jungle ne se reconnaît pas dans ce Dingley, « l’auteur le plus lu de l’univers », celui qui fait parler les bêtes et dont le Times a signé un jour un leader (en vérité, il n’est pas de puissance conservatrice plus auguste à déranger), c’est qu’il y mettra vraiment de la mauvaise grâce…

Dans un récit morcelé, tout en « sketches » rapides et colorés, on nous raconte comment le grand héraut de l’impérialisme, grisé par les acclamations et soucieux du document précis partit dès les premiers jours de la guerre pour le Transvaal !

En vain, sa femme essaie-t-elle de le retenir, de mettre un frein à son fougueux nationalisme, en lui disant : « Il est triste de penser que de jeunes hommes vont mourir pour d’autres hommes déjà riches, laids et vieux. » Il lui faut à tout prix son thème de roman.

Mais là-bas, sur le champ de bataille, au plus fort de l’action, la nouvelle lui arrive tout-à-coup que son fils Archie, demeuré au cap, se meurt. Et le grand Dingley redevenu un homme, un pauvre homme malheureux, chevauche nuit et jour à travers le Veldt couvert de blessés et de morts. On pense — ô belle et cruelle repartie — à cer-