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ANTÉE

musiques, un grand concert de faims, d’angoisses et de passions, sous les langoureuses lunes élec­triques.

Ceux qui représentent, à tort ou à raison, la vie de la ville, ceux qui roulent en voiture, dînent dans les restaurants, discutent dans les cafés, ceux qui garnissent les avant-scènes des théâtres, ceux qui prennent le thé à la Laiterie du Bois, ceux qui ont de beaux chevaux ou de noires autos étince­lantes, ceux qui portent habit, celles qui n’ont d’autre raison d’être que leur beau corps ou leur belle robe, les désœuvrés, les étudiants, les artistes notoires à la boutonnière blessée, les petits jeunes gens, les manieurs d’argent, chacun avec ses femmes, ont repris possession du pavé, et ils vont d’une dépense à une autre dépense, d’une passion à une autre passion, de divertissement en diver­tissement, et derrière eux s’agite avec fièvre la cohue de leurs fournisseurs, parasites ou valets. Allumez les cent mille bougies de toutes les salles de fête, puisque les maîtres sont arrivés !

Non ce n’est pas à ce titre qu’ils m’intéressent. La plupart d’entre eux sont en eux-mêmes antipathiques, et dans leur domination, hideux. Mais, acteurs ou figurants, ils sont indispensables à l ’acte qu’on joue de notre comédie. Chacun a un geste