Page:Antée, revue mensuelle de littérature, 1906-06.djvu/664

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
646
ANTÉE

s’appelleront mourir ;
les derniers hommes monteront sur les collines
pour s’offrir
à leur dernier soleil embrasé qui décline.
Mais moi, je veux alors que mes vers leur reviennent
comme une obsession de vie accumulée
dont l’assaut submergeant les entoure
et qu’ils leur soufflent, par bouffées,
la nostalgie inextricable de l’amour
que je regarde et que je palpe et que j’écoute,
qui hurle et chante et va grondant par mille voix
ce soir, et tombe en moi
à larges gouttes
de pluie d’orage
(oh ! regarde et sens :
il pleut à présent
épais et chaud comme du sang.)
Donc j’aurai fait, tant je m’efforce à le songer,
que ces hommes seront torturés par la rage
de créer avec des baisers,
et, d’un vouloir divin, dans un déchirement
engendreront d’eux-mêmes un sexe.
Ne les entends-tu pas, mon cœur, au loin des temps
qui bénissent d’une ivresse de chants exaltés
l’Éternité,
pour l’avoir vue
s’ouvrir devant eux comme une avenue
toute plantée