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ANTÉE

des haines et des graines
par toute la plaine.
Respire et sens :
par delà les prés et l’étang
l’immensité où tu t’abîmes
va s’élargissant ;
des senteurs montent, des bruits montent jusqu’aux cimes,
en aiguilles, de tes sens.
Un éclair a grillé mes yeux,
pour qu’ils regardent mieux.
Un souffle a fouetté mes reins
pour qu’ils scandent le rythme humain.
Des amants pâment dans les foins,
des corps là-bas s’étreignent,
d’autres corps saignent
d’aimer en vain.
Vertige des chairs nues dont les désirs s’enlacent
d’un bout à l’autre de l’espace
au fond des nuits d’été !
Douleur des chairs ensanglantées
de baisers irréels
qu’elles déchargent, et qu’elles appellent
en vain
à travers plaines et ravins !
Orages étouffés des chambres virginales
où des adolescentes s’exténuent
à se regarder nues,
et s’étonnent