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LA TÉNÉBREUSE
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— “ Ah ! vous avez vu Latour... ”, releva Isabelle.

— “ Quel homme distingué ! ” fit Cadichon à son tour. “ Il a été charmant pour nous... J’ai acheté une horloge, ce gros paquet que tu vois là..., eh bien, figure toi, il l’a portée lui même tout le temps... Il nous a reconduites jusqu’à l’hôtel. C’est possible qu’il ne parle pas beaucoup, mais il a une manière à lui de sourire qui fait plaisir...

— “ Vraiment ! ”, fit encore la Ténébreuse.

Étonnées de son accent, les jeunes femmes redressèrent la tête. — “ De quoi ! ” demanda Cadichon, d’un ton agressif. “ Ça ne te convient pas, ce que je dis là ?... Ma parole tu deviens insupportable... Qu’as-tu à lui reprocher ?... Je le trouve fort bien, moi : ce n’est pas ton avis, tant pis, ma chère !...

Les sourcils froncés, une ombre dans les yeux, la Ténébreuse eut un mouvement d’impatience. — “ En voilà assez ! ” fit elle brusquement. “ Une fois pour toutes, mes petites, je vous conseille de ne plus revenir là dessus... S’il est un être au monde que je ne puis souffrir, c’est bien cet homme insensible et sournois, sans intérêt, sans cœur, sans vie... Et d’ailleurs je suis bien bonne de vous raconter tout cela !... ” Mais devant le