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ANTÉE

on eut la résurrection du curé de Châtenay, embarqué pour Cythère avec une institutrice dont il soulageait le vague à l’âme, en pratiquant sur elle des onctions qui n’avaient rien de liturgique. Les abbés de Chab-Saint-Mard, les laïques pieux de Chartres n’auraient pas demandé mieux que de faire honneur à la Libre-Pensée d’un meurtre ecclésiastique. Les bons pauvres, les élèves des frères Quatre-Bras, les dames de l’Adoration perpétuelle poussaient leur boucan ordinaire, en attendant le “ pogrom ” qu’ils espéraient bien intenter contre les "ennemis de la Foi”. Monsieur Homais n’en menait pas large dans le département d’Eure-et-Loir.

Comme il fallait animer les esprits et jeter au plus près quelques semences de guerre civile, on résolut, dans le parti dévot, de célébrer un service funèbre à la mémoire de Joseph Delarue. Et ce fut dès lors, chez les messieurs prêtres, une émulation de gestes macabres, une débauche de requiem, une incontinence horrifique de messes et de vêpres à l’usage des morts. Les mêmes vicaires ou plébains qui, deux semaines auparavant, pédalaient ferme, scrutaient les buissons, détergeaient, d’une main robuste, le purin des basses-cours, sommaient les puits, alta ostia Ditis, de rendre à la