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ANTÉE

Fanfreluche et, en guise d’accompagnement, il pinça, mais si légèrement, quelques cordes de son petit luth. Le chant flotta, franchit doucement le seuil enchanteur et s’enroula autour des subtiles colonnes, jusqu’à ce que les phalènes fussent tou­chées de passion : elles se murent gracieusement dans leur sommeil. L’une d’elles fut éveillée par les notes plus intenses du luth de l’Abbé et papillonna dans la caverne. Fanfreluche sentit que c’était à son tour d’entrer.

“ Adieu ”, s’écria-t-il, en faisant un geste inclusif, “ adieu Madone ”, au moment où le cercle froid de la lune commençait à se montrer, beau et plein d’enchantements. Il y avait une ombre de sentiment dans sa voix lorsqu’il prononça ces paroles.

“ Plaise au ciel, soupira-t-il, que je puisse, avant de faire mon début, m’assurer de mon aspect dans un miroir ! Mais sans doute, puisqu’elle est une déesse, ses yeux seront quelque peu saturés de perfection et elle ne sera pas choquée de voir un tout petit défaut. ”

Une rose sauvage s’était accrochée à la garniture de sa fraise, et dans le premier transport de son déplaisir il voulut l’arracher brusquement et punir très sévèrement la fleur offensante. Mais sa