Page:Antée, revue mensuelle de littérature, 1906-06.djvu/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
ANTÉE

cer ces mots difficiles qui depuis une demi-heure s’efforçaient en sa poitrine. Mais la jeune femme sur le champ rappela sa compagne : interdit, il se tut, s’effaça et jusqu’aux Glaces n’ouvrit plus la bouche.

Au milieu d’un jardin plein de lilas et de roses, la pâtisserie n’était qu’une sorte de haut pavillon, une serre spacieuse qui, par d’amples baies entr’ouvertes, de toutes parts accueillait la transparente lumière de cette matinée de Mai. L’endroit des l’abord enchanta les jeunes femmes : en un coin tapissé de glycines et qui prenait vue sur la rue, elles allèrent s’asseoir aussitôt.

Leur entrée cependant avait été remarquée. Daquin ne put retenir un geste d’ennui à voir des jeunes gens qui pour les mieux observer venaient s’installer non loin d’elles. Cadichon et Boboli en vérité songeaient bien à y prendre garde ! Appuyées à la fenêtre, elles considéraient les cent visages inconnus de la foule qui sous leurs yeux inlassablement s’écoulait. Avec l’heure qui s’avançait, le flot semblait se faire plus nombreux et plus vif. Des toilettes claires, un dolman d’officier, un moment, éclataient au grand jour, puis s’éteignaient sous l’ombre des tentes bariolées. Étincelantes et rapides, des voitures l’une derrière