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JOURNAL DES REVUES.


Dans l'Occident de Juillet M. Georges Rémond nous donne d’intéressantes pages sur Chioggia, île de pêcheurs à vingt-cinq kilomètres de Venise. Nous en détachons ce passage savoureux :

— Nous mangions, sur cette rive, dans une “ trattoria ” sale, mais inondée de lumière. Les voiles se balançaient à travers les fenêtres. On y trouvait du poisson frais, grossièrement accommodé, et nous y arrosions de lourd vin Padouan la polenta et des ragoûts douteux. Un peintre Hollandais n’eût pas quitté cette auberge où les scènes les plus gaillardes se déroulaient dans le décor le plus pittoresque. La viande grillait dans une grande cheminée, côte à côte avec le poisson et les beignets, s’enrichissant réciproquement de leurs diverses odeurs. L’hôte Ruggiero, vieil abruti sympathique, aux yeux clignotants, semblables à ceux des poissons sur le gril, au nez tordu à droite, couvert de rigoles sanguinolentes qui parfois éclataient, surveillait la cuisson. Il boitait bas, paraissait somnoler, contait, de temps à autre, les exploits