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LA TÉNÉBREUSE
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les voitures. Mais la chaussée en deux bonds traversée, les jeunes femmes, aux vitrines éclatantes d’un bazar, soudain avaient fait halte. En vain les voulut-il entraîner ; Cadichon ni Boboli ne l’écou­taient ; rien ne semblait plus exister pour elles que les verroteries, les bois sculptés et les bibelots profusément étalés sous leurs yeux. Tout au long des maisons, les étalages se succédaient : devant chacun d’eux, force désormais fut à Daquin de se morfondre aux côtés des jeunes femmes qu’enfié­vrait le plaisir d’une découverte incessamment renouvelée. Elles s’étaient arrêté de parler. Penchées sur la glace que leur haleine touchait, un moment, elle se tenaient immobiles ; bientôt quel­que objet nouveau les attirait plus loin, vivement, elles avançaient ou bien, tournant la tête, d’un geste appelaient auprès d’elle Raymond qui, tout heureux de se rapprocher de Boboli, s’empressait servilement.

Si indifférente q u ’elle demeurât à ses supplications muettes, le jeune homme en effet ne se décourageait pas. Suspendu à ses mouvements, au moindre sourire qui tombait de ses lèvres mobiles, il continuait d’attacher sur Boboli un regard ardent et craintif à la fois. Cadichon enfin s’étant un instant attardée, il parut près de pronon-