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JOURNAL DES LIVRES
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Et mon cri est immense et mon oreille éclate
Quand je l’entends.

ou bien cette image qui fait songer à Rodin :

Mon amour tout puissant m’écrase et me pétrit
Comme le boulanger pétrit la pâte fraîche

Et parmi tant d’autres encore une de ces associations jaillies de l’inconscient du poète, où par n’importe quel travail, il est impossible d’atteindre.

Faut-il avec son sang teindre toute la laine du temps mystérieux ?

Cependant si l’image est la pierrerie qu’il faut sertir dans le vers, les expressions justes et qui définissent en font la matière même. Adam appelle chaque être par son nom, dit l’écriture. Voilà l’idéal de la parole humaine : forcer la chose à obéir au vocable qui la désigne intimement, à se ranger sous la domination du maître, seul anthro­pomorphisme qui nous reste. Là est un des plus remarquables efforts de Louis Thomas. Une harmonie obtenue par le rapport vrai d’objets simples, d’expressions exactes, occupe pleinement ses poèmes quand la splendeur inattendue de la comparaison s’est éteinte.