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ANTÉE

Hugo. Nous avons en Robert Bridges un poète lyrique qui par son charme exquis et profond est comparable à M. Henri de Régnier. M. Yeats nous apporta d’Irlande un merveilleux sauvage ; il est notre seul symboliste conscient. (Tous les poètes sont des symbolistes inconscients). Nous avons en M. Watson et M. Binyon des poètes accomplis ; enfin un poète vigoureux en M. David­son, un poète aux étranges harmonies en M. Francis Thomson. À côté de Meredith qui est un Stendhal parlant par la bouche de Mallarmé, et de Thomas Hardy qui a recréé en ses paysans anglais les paysans de Shakespeare, nous avons Rudyard Kipling qui possède d’une façon égale les mérites et les défauts de Dickens, et qui a caricaturé le caractère anglais, avec une habileté admirable et sans s’apercevoir qu’il était un satiriste national. Nous avons Joseph Conrad qui apporta de Pologne à la littérature anglaise une nouvelle et mystérieuse beauté, qui couve encore ; et Maurice Hewlett qui est un Dumas moyenâgeux tourné à la précio­sité. Nous avons Henry James, américain du continent, épris de l’Angleterre, mystérieux artiste plus dissemblable de M. Bourget que tout autre écrivain vivant, et George Moore, qui sans rien avoir de Zola, fut jadis notre seul réaliste, et qui