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PETITES ÉTUDES D'HISTOIRE LITTÉRAIRE
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quand on parcourt de l’œil la distance visible qui sépare encore un procès de tendance esthétique et une enquête de psychologie humaine. En dépit de quelques auscultations, de quelques mensurations et d’une terminologie vaguement scientifique, nos analystes des revues d’art n’ont guère fait de chemin depuis La Harpe. Ils rééditent ce brave homme avec une ferveur ingénue, qui, même dans les revues jeunes, nous procure toujours une certaine gaîté. Certes, la science contemporaine a, pas à pas, conquis à ses observations toutes les portions anatomiques et physiologiques de l’étude du cerveau. D’un autre côté nous devons à Stendhal, Villemain et Sainte-Beuve, mais surtout à Taine, à Guyau, Th. Ribot et son école, de profondes et merveilleuses aperceptions sur le rapport de l’œuvre artistique avec l’artiste, et de celui-ci avec son milieu. Mais ces aperceptions sont restées fragmentaires. Entre les plus récentes découvertes sur l’émotivité nerveuse, les associations d’idées, ainsi que les phénomènes de l’attention et de la mémoire, et les plus heureuse formules d’équation de l’homme et du livre, n’a pas encore été opérée la jonction désirable, qui aura pour effet de mettre définitivement à nu le mécanisme physique d’une création morale.