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ANTÉE

jeunes hommes de lettres qui, aux environs de 1885, avaient eu l’intuition, plus ou moins confuse, d’un idéal nouveau. Et à la tête de cette presse qui, houleuse et abondante à l’ordinaire, goguenardait devant l’apparence d’un cercueil, on vit des profes­sionnels de la critique retrousser les manches et préparer les rites du définitif enterrement.

Excellemment, M. Robert de Souza réplique à tous ces “ fossoyeurs ” , comme il les qualifie avec plus d’esprit que de cruauté : Qu’avez-vous fait, leur dit-il, pendant que nous étions silencieux ? Qu’ont fait les autres, ceux qu’exalte votre critique ? Nous travaillions, nous, à volets clos, et vous, vous chantiez, vous dansiez peut-être ! Vous ne cessiez de nous tendre, de loin, l’éponge imbibée de fiel. Mais à qui porter maintenant les couronnes ?

Hélas ! si la prose de ces dix ans s’est enrichie de quelques écrits, dont les vertus originales ont réveillé timidement nos espoirs, si nous avons vu naître ou croître l’art de quelques romanciers, en vain affirmerait-on qu’un livre de vers ait rafraîchi nos âmes, qui ne fût pas vêtu de cette forme libre, agile, parfois déconcertante, mais toujours