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LA TÉNÉBREUSE.¹


Au cri que poussa Cadichon, Boboli qui bayait le nez en l’air se retourna juste à point pour accueillir d’un sourire étonné le grand jeune homme efflanqué qui, du plus loin qu’il les avait aperçues, s’était mis à courir en agitant les bras. “ Bah ! c’est vous, Raymond !.. ”, s’exclama-t-elle. “ Ah bien ! En voilà une rencontre !.. Du diable, si nous pensions vous voir ce matin !... ”, et gentiment, elle lui tendait sa main nue toute hérissée de bagues.

Haletant et bouleversé, Daquin les contemplait l’une après l’autre, en silence, comme si l’émotion lui eût coupé la parole " Est-il possible ! ” fit-il enfin, “ Vous êtes ici, et je n’en savais rien !.. Ah ! ce n’est pas bien : pourquoi ne pas m’avoir prévenu ?.. ”, et reprenant la main de Boboli, d’un air à la fois de ravissement et de regret, il consi­dérait longuement la jeune femme dont les grands yeux souriaient sous ces cils entre-clos.

Mais sans laisser à son amie le loisir de s’expli-

(¹) Premier chapitre d’un roman à paraître prochainement sous ce titre.