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ANTÉE

M. de Gourmont est donc un oncle, et m’apparaît avec la majesté d’un soutien donné par la nature : cet aspect me flatte, il me réjouit. À l’âge où les oncles m’importaient, j’eusse voulu que M. de Gourmont fût mon oncle ; je le voudrais encore aujourd’hui.

Mais examinons le précepte de M. Thomas. Je le crois inspiré du meilleur esprit politique. Le prince des penseurs de cet ordre (j’ai nommé Machiavel) ne procède jamais que par des vues aussi saines, aussi simples, aussi fortes. Qui blâmerait M. Thomas d’être politique, c’est un barbare que je blâme. Un peu de politique prévient plus de fâcheux effets que beaucoup de sacrifice et de vertu n’en rachètent. Je veux donc entrer dans le point de vue de mon aimable adversaire, encore que le mien d’abord ne fût que vertueux.

Il y a deux fins pour le politique : I° poursuivre l’avantage de son idéal ; 2o poursuivre son avantage propre. Je ne puis que je n’avoue que je ne saurais être politique, que ces deux fins ne se confondent pour moi. Car, par quelque complexion singulière ou répandue entre les hommes, très dommageable à la modestie, nul idéal ne m’apparut jamais dont je ne me sentisse la plus excellente forme dans l’univers cognoscible. Il s’ensuit que