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ANTÉE

Je le vois, non loin des nounous et des enfants en robes claires, se promenant dans le jardin du Luxembourg si charmant, que chantèrent les fines lithographies de Whistler. Il médite assurément, sur sa destinée, sur sa douleur de jeune poète, sur l’amour, dieu et vampire, se rappelle les soirs au balcon ; mais il rêve aussi à son Alsace, aux forêts natales. Et ces souvenirs lui inspirent des poèmes émus. Il revoit “ la plaine et les hameaux paisibles de l’Alsace, ” les chers “ sapins que le soleil d’un long regard caresse,” le vallon “ dont les vagues collines trempent dans la brume du soir. ”

Parfois même, il revient à son Alsace et tel paysage chéri qu’il revoit chaque jour le rassérène miraculeusement.

Je reviens si souvent devant ce paysage
M’asseoir, et j’y découvre un charme si nouveau,
Que mon cœur oublieux du monde devient sage
Et connaît en tremblant un divin renouveau.

Comme nous comprenons ce baptême !

On trouve dans le livre de M. Jean Morel des négligences, du flou, ce manque de précision dans l’image propre à beaucoup de livres jeunes, des rejets faciles. Mais on y rencontre à chaque instant une sensibilité délicate et des vers qui sont d’un vrai poète.