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LE VOYAGE À ORANGE
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Si j’écrivais dix pages sur cette femme, il y aurait quelques échappés de séminaire pour dire que je m’intéresse plus aux interprètes d’une pièce qu’à la pièce elle même. Mais savent-ils ce qu’est le théâtre, et que mettre un chef-d’œuvre entre les mains de sots, c’est le vouer au ridicule. Et dans cette invincible fraternité qui lie tous les artistes, pourquoi oublier que ces gens de théâtre sont les plus malchanceux, qui comme le critique, s’élèvent au moins aussi haut que l’auteur, et ne laissent derrière eux qu’un nom qui va s’effaçant avec la mémoire des hommes.

Une croix et l’oubli, la nuit et le silence !
Écoutez ! c’est le vent, c’est l’océan immense,
C’est un pêcheur qui chante au bord du grand chemin,
Et de tant de beauté, de gloire, d’espérance,
De tant d’accords si doux, d’un instrument divin,
Pas un faible soupir, pas un écho lointain !...

Malibran, Champmeslé, ô Rachel, ombres claires.

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Les fêtes terminées, chacun rentra chez soi. Cependant, mes lecteurs, comme je suis bavard