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ANTÉE

avec une cravate de même étoffe lui donne une allure chevaleresque et confortable, le paladin des textes, l’érudit saharien, et comme le dirait un personnage des Mille Nuits et une Nuit, le méhari de l’érudition. Mme Lucie Delarue-Mardrus, mince, en jupe trotteur, sous une capeline, l’air d’une petite fille de quinze ans, et ses yeux, ses yeux étonnés, admirables et profonds, ses yeux qui font des déclarations aux pierres, elle écoute son mari, qui explique, qui explique intarissa­blement.

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Le soir, Polyphème et Horace.

Deux imbéciles, Mossieu un tel et sa dame, têtes de quincailler, ventres de notaire, esprit de sous-officier, politesse de zouave, me génèrent durant toute la représentation de Polyphème : les gens qui ne comprennent pas la poésie sont de sinistres barbares, avec leurs pensées imprévues ; et Mirbeau était juste en écrivant Sébastien Roch. Il me parût que M. Albert Lambert fils fût un très noble Polyphème : douloureux et blessé, et plein d’une pitié muette, il donna avec une très grande sûreté la pièce de Samain, en somme plus humaine que divine. M. Saillard, Melle Berthe Bovy