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C’EST MARS...


C’est Mars pubère et innocent. Oh ! vois :
d’entre les vieux terrils qui reverdissent,
des cheminées, aux Agrappes, jaillissent ;
longs peupliers nus, fatidiques doigts

vers ce mobile ciel d’après-midi
— azur, ocre et argent — où la fumée
s’éploie, où déjà la lune, esseulée,
meurt du désir d’un fin soir qu’elle attiédit.
 
À l’infini, la plaine est toute blonde
de soleil et de cris précis et de chants.
Ô douceur ! ô beauté ! Entends l’ahan
rythmé des fosses où la cage remonte...
 
Une branchette aux dents, le dos voûté,
le mineur rentre, alerte, à son logis.
A même un saladier entre ses cuisses serré,
Il mangera — ô joie ! — les pissenlits
 
dentelés, si frais à la bouche en feu,
que les enfants, tout un jour, dans les prés
cueillirent avec passion, silencieux.
Mars frêle et pur ! Les rameaux noirs des haies