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ADAM
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partout... Oh ! oui, ce n’est pas toujours drôle. Et avec cela la question d’argent... Moi j’habite dans les arbres, je mange des racines et je prends du poisson... mais vous autres., avec toutes vos maladies, en outre.

Du fond des temps futurs je vois monter l’insurrection des phénomènes. Sur le promontoire de la nature où je me dresse clame par ma voix l’extrême écho des mondes. Chaos, cataclysmes, luttes et hasards : la nature est une éternité de défaites. S’il en est une autre en elle, jamais l’âpre cri de ma chair, qui de cette éternité investit cependant, après tout, la ruée même, ne m’en a fait connaître, fût-ce une seule seconde, l’étreinte. Impossible de te saisir jamais, totalité qui nous emporte et dont le vœu nous consume. Paul, mon détracteur, est mort, son Jésus meurt tous les jours... comme une catin ! et je mourrais volontiers si cela devait me permettre d’aspirer à votre fameuse coupe des voluptés un seul long trait de joie plénière qui ne ramenât point la lie. Mais du sépulcre pourrissant où les dieux ont toujours un pied, de l’ossuaire de tant de corps qui piétinaient aux portes, le soupir de l’abîme ne soulève vers moi que le serpent du spleen et de la replétion, ou la spirale indéfinie du désir.