et qui ne sera vraiment qu’à la mort, comme ces
deux femmes qui se pressent et râlent, comme
moi, comme nous tous !
À la mort seule appartiendront ses paupières,
douces comme des grèves de chair, et ses yeux,
ses yeux immenses que j’ai crus pleins de rêves
mystérieux et magnifiques, et ces mains que je
serre si souvent et qui me sont, pourtant, aussi
étrangères que la tige d’un iris ou l’argent de
cette pipe, et ces épaules rondes, et ces seins que
j’ai mordus, et ces jambes fuyantes, et tout son
corps, et si j’étais la mort, je la posséderais. Car
posséder, c’est détruire et disperser, c’est s’évanouir
et se fondre et ne faire qu’un avec ce que
l’on étreint, dans le néant et dans l’amour !
Aimer, toujours aimer ! Pourquoi bâtir au soleil un temple de sel sur le sable, pourquoi vouloir éterniser une rose et se cacher de la mort derrière Dieu ? La main de l’homme n’est pas faite pour tenir, elle s’ouvre, parce que rien ne demeure en elle et comme l’eau glisse entre les doigts, la femme glisse dans la vie. Mais il n’y a amour, ni regret, ni désir sous le Bouddha doré qui veille sur ma méditation, et il n’y a pas de vanité dans l’opium…