fois, on prononce : “ cela n’a pas d’importance ”— un acquis de sagesse se manifeste.
Pour l’enfant, tout se présente avec une énormité capitale. Un jouet, une gronderie, une veste neuve accaparent l’être et ses émotions. Une assiette cassée est un drame. Un sou perdu vaut des pleurs...
Alors, la vie, jour par jour, effectue son œuvre d’appropriation et de triage. On regarde mieux, de plus près, et on détermine des valeurs plus exactes. À l’exemple d’Alphonse Karr qui scindait la botanique en deux groupes de plantes : les sérieuses, que l’on peut manger, — et les autres, on sépare la vie en deux ; d’un côté, on range, avec considération, les choses graves qui méritent temps et peines ; de l’autre, les choses négligeables et secondaires. Et le travail de vivre et d’observer consiste à diviser toujours plus justement les éléments mieux connus en faisant passer successivement dans le compartiment des sans importance ce qui, par avant, avait paru solennel. À un certain âge, c’est à dire à un certain degré de cette constante classification, on s’aperçoit que, petit à petit, tout vient tomber dans le débarras des chimères autrefois sublimes, des mirages décevants et des illusions dont il faut se défendre...
