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ANTÉE

de divine lumière
qui se coula languide et doux sous ta paupière.

Et tu dormis avec ce rayon dans tes yeux.

Ta tête reposait, lourde un peu,
frôlant presque ma joue ;
tes longs cheveux cendrés me caressaient le cou ;
et le désir naissait en moi
de te ravir soudain aux regards de la nuit
et de fuir avec toi
vers de vastes palais d’amour et d’espérance.
Mais je craignais de rendre à l’ombre et au silence
qui près de nous rôdaient toujours, à pas très lents,
le cher rayon tremblant
qui sommeillait au fond de tes yeux las.

... Et c’est pourquoi, chère, je ne t’éveillai pas.

Lascive et moite, la nuit d’août
s’illuminait d’une lune pâlie
qui sur ta face et tes cheveux de fée jolie
laissait errer son regard doux.
Et je ne savais pas, tant tes traits étaient calmes
si tu rêvais de joie, de tendresse ou de larmes ;
je ne devinais point ce que ton front cachait,
tant ta chair adorée semblait marmoréenne
sous les étoiles d’or et sous la lune claire.