Page:Antée, revue mensuelle de littérature, 1906-06.djvu/144

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
136
ANTÉE

et la douleur élue. Je suis la Poésie et je suis la Nuance. Ma flamme se défait dans la nature entière et mollement j’expire au plus profond des cœurs.

OCULI.

L’entendrai-je se vanter ainsi et parer de couleurs séduisantes son imagination, son vice et son erreur ? Ô Dieu, prête-moi ton secours ! Cieux, espaces énergiques dont les étoiles sont la flore, et les comètes la faune qui va dévorant les mondes, suspendez votre fuite, entr’ouvrez vos abîmes. Qu’une troisième révélation, celle du Paraclet après celles du Fils et du Père, vienne, Seigneur, consommer nos destins. Puisque les cieux sont aux violents qui les ravissent, je te fais violence, Adonaï ! Comme celui qui terrassa ton messager, je lève sur toi le roc aride de mes poings. Du fond de mon iniquité je me dresse et je clame sans merci comme une voix dans tes entrailles. Je suspends à ta face, ma désolation et mon opprobre et par ce poids j’entraîne ta gloire parmi nous. Dieu de miséricorde ! les flammes de vingt siècles te molliront comme une cire. Tu retentiras de nos plaintes comme un bouclier, je te frapperai comme un arbre chargé d’armures et la sonorité de