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à Saint-Cloud

vignes, des pois verts & des haricots, & il nous conduisit à une grande porte charrière, par laquelle nous passâmes, pour arriver dans un bois percé de différentes avenues plantées d’arbres sauvages, qui n’avoient ni fleurs, ni fruits. J’avoue que j’aurois été fort embarrassé, si je me fusse trouvé seul dans un endroit si éloigné & si champêtre ; car je n’aurois su quelle route tenir ; mais aussi ne quittois-je point mon conducteur, que je suivois pas à pas. Quelques petits besoins pressans le firent écarter du grand chemin, pour s’enfoncer dans le plus épais de la forêt : j’y fus avec lui, & j’aimois mieux l’y accompagner, que de rester seul, & de risquer de le perdre.

Dans le moment que j’étois ainsi spectateur oisif & passif, & que je faisois des réflexions qui n’étoient point de paille, sur l’odeur qui m’électrisoit, malgré l’eau sans pareille dont je me baignois, je vis sortir du pied d’un arbre un petit oiseau qui ressembloit si parfaitement à mon serin, que je crus que c’étoit lui-même qui s’étoit échappé de sa cage, pour me venir trouver à Saint-Cloud, où il avoit entendu dire que j’allois ; je louai son bon petit cœur ; je l’appelai, & courus après lui ; mais je reconnus bientôt que c’étoit un oiseau sauvage qui avoit cru dans les bois, & non dans une cabane