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Voyage de Paris

ma perruque, que j’avois perdus en venant de Paris. Il eut la complaisance de me conduire chez le meûnier ; nous n’y trouvâmes que sa fille, qui nous parut fort aimable, & ne se sentant point du tout de la trémie d’où elle étoit sortie ; elle nous reçut très-poliment, & avec des façons d’une fille au dessus de son état. Après lui avoir donné le signalement de ce que nous demandions, elle nous ouvrit une grande armoire remplie de tant de sortes de choses, que l’inventaire en seroit trop long ici, & trop fatigant pour moi ; tout ce dont je me souviens, c’est qu’après avoir examiné nombre de chapeaux, je n’y trouvai point le mien ; j’y remuai un tas de perruques de médecins & de procureurs, sans y reconnoître la mienne ; j’y comptai deux cents douze calottes, cent vingt-neuf bonnets d’actrices de l’opéra, seize petits manteaux d’abbé, dix-huit redingotes, cent cinquante frocs de moines de différens ordres, & un nombre infini de méchans livres nouveaux, que le lecteur, outré de les avoir payés si cher, avoit jetés à l’eau.

Toutes nos perquisitions devenues inutiles, nous prîmes congé de la belle meûnière. Au sortir du pont, nous entrâmes dans une grande plaine parquetée de sable ; le chemin qui la traversoit, étoit bordé des deux côtés par des