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à Saint-Cloud

l’on m’en avoit fait, je me le figurois aussi puissant sur ses sujets que l’est sur ses écoliers un régent de sixième, qui peut leur donner le fouet ou des dragées, suivant qu’ils l’ont mérité. La première fois que je le vis, ce fut un jour de congé, au petit cours, où il passoit en allant à Compiègne. Je n’avois pas plus de dix-sept ans pour lors ; cependant, à sa vue, je me sentis intérieurement ému de certain sentiment de respect que lui seul peut inspirer, & que personne ne sauroit définir. Je trouvois tant de plaisir à le considérer, qu’après l’avoir bien vu à mon aise dans un endroit, je courois vîte à un autre, pour le revoir encore ; de sorte que j’eus la satisfaction de le voir sept fois ce jour-là, & je crois que je le verrois toujours avec le même empressement. Je me souviens bien que je fus moins ébloui de la magnificence de sa nombreuse suite, que frappé des rayons majestueux qui partaient de son auguste front. Jusques-là je m’étois imaginé qu’il n’y avoit rien de si beau dans le monde qu’un recteur de l’université, précédé processionnellement des quatre facultés : ensuite, sur le bruit de ses exploits militaires je le comparois aux César & aux Alexandre, dont parlent nos auteurs latins. Au récit de son goût & de sa protection pour les arts, je lui trouvois toutes les qualités