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ciel, c’est une force d’esprit que la grâce seule est capable de nous fournir.

Dieu ne fait pas un grand mérite à l’homme d’observer ses loix tant qu’il le comble de prospérités. Dans le dialogue que le diable eut avec son créateur touchant Job, il emprunte de-là un argument qui n’est que trop concluant d’ordinaire : Oui, dit satan, Job est homme de bien, & la chose n’est pas surprenante, tu lui donnes tout ce dont il a besoin ; je te servirois moi-même & je te serois aussi fidèle que Job, si tu me faisois autant de bien qu’à lui. Maintenant mets seulement un doigt sur lui, arrête un peu ta main, dépouille-le un peu, & rends-le semblable à un de ceux qui se courbent devant lui, tu verras qu’il est tout comme les autres hommes ; & même le chagrin qu’il aura de ses pertes, le portera à te maudire en face.

Il est vrai que la conjecture du diable ne fut pas juste : mais cependant il y avoit beaucoup de probabilité, & l’on en peut tirer les conséquences suivantes :

1o. Que c’est une chose aisée de soutenir le caractère d’honnêteté & de droiture, quand un homme n’est pas embarrassé dans des affaires épineuses & qu’il n’est pas talonné par la disette.

2o. Qu’il est tems de prouver qu’on a véritablement le caractère d’honnête homme, quand on accablé par le malheur.