Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conduite est déraisonnable & contraire à la nature.

J’ai vu des gens qui outroient assez cette matière pour soutenir qu’un homme poursuivi par un procès injuste, devoir plutôt souffrir patiemment ces attaques que de les repousser par la force des loix. Cependant ces mêmes gens si patiens, en faisant le personnage des autres, ne l’étoient pas assez quand il s’agissoit d’eux-mêmes, pour ne pas poursuivre en justice un débiteur qu’ils ne pouvoient pas réduire à la raison par d’autres moyens.

Je ne blâme pas leur conduite ; mais je condamne leur opinion ; je ne trouve rien à redire au procédé d’un homme qui tâche à se faire payer en justice d’une dette réelle, contractée par un débiteur à qui il ne manque rien pour payer, que le cœur d’un honnête homme ; mais je trouve de la cruauté à pousser aux dernières extrémités un débiteur plus infortuné que coupable, à mettre sa famille dans la rue, & à le faire mourir dans la prison. C’est-là la conduite d’un barbare, & non d’un honnête homme.

On m’objectera peut-être que, si je voulois agir avec tout le genre humain comme je voudrois qu’on agît avec moi, en pareil cas, je serois obligé de soulager la misère de tous les pauvres, & d’acquitter les dettes de tous les débiteurs