raisons pour défendre une pareille conduite. Voici l’argument dont ils se servent.
Un homme fondé sur mon crédit, & sur l’idée qu’il a de ma probité, me confie son argent ou ses marchandises ; il croit trouver sa sûreté dans mon intégrité & dans mes moyens. S’il vient me sommer de satisfaire au contrat que nous avons passé ensemble, il renonce à la sûreté qu’il avoit cru trouver dans ma vertu & il ne s’attache plus qu’à la sûreté que la loi peut lui faire trouver dans le bien que je possède ; il se détache entièrement de ma probité, & il ne se sert que du contrat en question, pour me faire payer, que je le veuille ou non. N’est-il pas juste que je me défende avec les mêmes armes avec lesquelles il m’attaque ? Il ne me combat que par la loi ; je soutiens & je repousse ses attaques de la même manière, & mon action est toute aussi légitime que la sienne.
C’est ainsi que la lettre de la loi détruit entièrement le caractère d’honnête homme dans le créancier & dans le débiteur, & qu’elle fournit des excuses plausibles à l’un & à l’autre, & des raisons spécieuses de se croire honnêtes gens.
Ce ne sont pas-là cependant les gens d’honneur dont je parle ici ; la véritable honnêteté n’est pas une vertu purement négative. Il ne suffit pas pour être honnête homme, de ne faire à son
