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n’est pas connue de tous les botanistes ; elle ne se multiplie pas beaucoup dans les endroits où on la sème. Elle ne croît pas aisément dans un terroir fort gras, & elle se sèche dans un terroir fort maigre, à moins qu’elle n’y ait pris de profondes racines. Dans ce cas-là, il arrive rarement qu’elle soit détruite tout-à-fait. Si elle paroît quelquefois accablée de la mauvaise herbe de la prospérité, elle sait se débarrasser de cet obstacle, & quand elle est tellement abattue par les coups de la pauvreté, qu’on la prendroit pour morte, elle reprend vie au moindre beau tems ; la moindre pluie lui rend toute sa vigueur, & lui fait produire sa semence.

La mauvaise herbe, qui est la plus pernicieuse, s’appelle finesse ou subtilité. Elle cache si bien cette plante salutaire, qu’il est souvient presque impossible de la trouver. D’ailleurs, elle lui ressemble si parfaitement, qu’il est facile de se tromper, en la prenant pour cette admirable simple. C’est une espèce d’honnêteté sauvage ; & j’ai entendu dire à ceux qui en ont semé dans leur propre terroir, & qui en ont fait usage dans le commerce de la société civile, croyant que c’étoit la plante véritable, qu’il leur en a coûté tout leur crédit, & qu’ils ont ruiné celui de tous ceux avec qui ils avoient affaire. Cette méprise n’est pas rare, & c’est-là la cause de toutes ces plaintes