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cules, & tant qu’il demeure à un homme, il n’eſt pas poſſible de lui en donner un qui ſoit réellement ignominieux. Ce caractère rend un homme recommandable à la poſtérité, lors même que ſes autres qualités & ſes autres perfections ſont livrées à un éternel oubli. Sans cette vertu, il eſt impoſſible de mériter le nom de chrétien ou de gentilhomme. On peut être pauvre & honnête homme ; malheureux & honnête homme, mais il eſt contradictoire d’être mal-honnête homme & noble, chrétien & mal-honnête homme. En vain compte-t-on un grand nombre d’illuſtres ancêtres : ſi l’on n’imite pas leurs vertus, on y déroge véritablement par le caractère de mal-honnête homme, & il ſeroit juſte de mettre une barre dans l’écuſſon d’un fripon d’une naiſſance diſtinguée, comme on en met une dans celui d’un bâtard. Quand un gentilhomme renonce à la vraie honnêteté, il ceſſe d’être gentilhomme ; dès-lors c’eſt un véritable faquin, & il mérite d’être traité dans le monde ſur ce pied là.

Cette vertu caractériſtique fait de ſi profondes impreſſions ſur l’eſprit des hommes, qu’elle arrache de l’eſtime à ceux-là mêmes qui ne prétendent pas ſeulement y avoir la moindre part. Ils la recherchent dans les autres, quoiqu’ils ne tâchent pas de l’acquérir eux-mêmes, & jamais homme n’a eu aſſez peu de tendreſſe pour