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jours occupé à chercher ſes propres avantages, ſans avoir le tems de ſonger a ceux des autres. Il me paroît même évident qu’il ne ſauroit être ſuſceptible de cette vertu ; il a beau payer ſes dettes, juſqu’au moindre denier, & être, à cet égard, dans l’exactitude la plus ſcrupuleuſe, il n’eſt pas impoſſible que ſa juſtice ne ſoit accompagnée de la plus ſouveraine injuſtice, ſelon cette maxime, ſummum jus eſt ſumma injuria, le plus grand droit eſt quelquefois l’injuſtice la plus grande.

Payer exactement ſes dettes, c’eſt ſatisfaire à une loi ſemblable à celle qui règle les déciſions de nos tribunaux ordinaires ; mais faire à tous les hommes tout le bien dont on eſt capable, c’eſt ſatisfaire à une loi ſemblable à celle qui règle les déciſions de notre chancellerie, où l’on a autant égard à l’équité, qu’à la juſtice priſe dans ſon ſens le plus borné. La loi ordinaire n’a point de priſe ſur nous, ſi nous payons nos dettes avec exactitude, & ceux avec qui nous en uſons de cette manière, ne ſauroient former contre nous, devant les juges de la terre, aucune plainte fondée : mais devant la cour ſouveraine du ciel, un homme pourra nous intenter un procès, ſi nous avons manqué de lui rendre tous les ſervices qui étoient en notre pouvoir. Ce juge ſouverain a érigé dans la conſcience de chaque homme un