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tentèrent pas même ſa probité, non-ſeulement elle m’envoya en marchandiſes la valeur de cent livres ſterling que je lui demandois ; elle eut encore pour mes véritables intérêts des attentions que je n’avois pas exigées d’elle ; elle joignit à ces marchandiſes pluſieurs choſes qui m’étoient d’une grande néceſſité, entr’autres deux bibles, & d’autres livres utiles, dans le deſſein, comme elle me l’a dit enſuite, de me fournir les moyens de ſoutenir ma foi, qui devoit être expoſée à de rudes attaques dans un pays plein de payens.

L’honnêteté, dans le ſens que je l’emploie ici, ne nous porte pas ſeulement à payer exactement à notre prochain ce qui lui eſt dû, ſelon les règles de la juſtice. Celui qui mérite véritablement le titre d’honnête homme ſe reconnoît débiteur de tout le genre humain ; il ſe croit obligé de faire aux hommes, tant pour l’ame que pour le corps, tout le bien que la providence divine lui donne occaſion de leur diſpenser. Il ne ſe contente pas d’attendre tranquillement ces occaſions, & de s’en ſervir avec exactitude, il ſe fait une étude ſérieuſe de les faire naître ; & j’oſe dire que quiconque n’eſt pas capable de cette attention généreuſe, n’eſt pas un parfaitement honnête homme.

Selon ce principe, je doute fort ſi ce titre peut jamais être donné à un homme intéreſſé, tou-