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Tous les motifs qui nous portent vers le bien & vers le mal, ſont dans l’ame même, les objets extérieurs ne leur ſervent que de cauſes ſecondes ; & quoique certainement on rende les actes criminels impraticables, en mettant une diſtance entre les deſirs & leurs objets, ce n’eſt pas-là la route qui mène à l’innocence. Le crime n’eſt pas ſeulement dans l’acte même, il eſt ſur-tout dans le deſir de le commettre, & par conſéquent cette ſéparation n’eſt rien, & ne produit aucun effet ſalutaire. On peut commettre autant d’adultères dans un cloître où jamais femme n’entre, que dans tout autre endroit, & il eſt apparent que la choſe arrive préciſément ainſi.

Selon ces principes, l’abſtinence du mal ne dépend pas entièrement des limites qu’on preſcrit à ſes actions ; mais encore des bornes qu’on donne à ſes deſirs, puiſque c’est pécher réellement, que de deſirer de pêcher. L’acte que nous commettrions, ſi l’occaſion s’en préſentoit, doit être cenſé avoir été réellement commis, & l’on en eſt tout auſſi reſponsable. Quel ſecours par conſéquent la piété peut-elle tirer non-ſeulement des retraites involontaires, mais encore des vœux qu’on fait de propos délibéré de vivre dans la ſolitude ? Dompter ſes deſirs vicieux, c’eſt l’unique préſervatif contre le péché.

Quelques années s’étoient écoulées après mon