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calme de l’ame, que l’argent qu’un homme a dans ſa bourſe n’eſt capable d’en ſortir ſans ſon conſentement, pour payer les dettes de ſon poſſeſſeur, ou pour fournir à ſes beſoins.

C’eſt auſſi la liaiſon de l’ame avec les objets extérieurs, ſi propre à interrompre ſes méditations pieuſes, qui fournit le prétexte le plus plauſible à ceux qui cherchent les ſolitudes & les déſerts. Mais quel profit en tire la religion la plupart du tems ? Un penchant vicieux, quoiqu’éloigné de ſon objet, eſt toujours un penchant vicieux ; & il eſt auſſi criminel, que s’il agiſſoit ſur un objet préſent. Si, comme nous l’enſeigne notre Sauveur, celui qui regarde une femme pour la convoiter, a déjà commis adultère avec elle, il s’enſuit, que celui qui penſe à une femme pour la convoiter eſt coupable du même crime, quoiqu’au lieu de s’offrir à ſes yeux elle ne ſoit préſente qu’à ſon imagination. Ce n’eſt pas en tranſportant le corps d’un lieu dans un autre, qu’on bannit ces ſortes d’images du cerveau, ou qu’on leur ôte leur force tyrannique ; c’eſt en dérobant ſon ame à la tentation, & en lui ménageant un pouvoir abſolu ſur ce penchant vicieux. Sans cette précaution, ce deſir criminel reſſemble à de la poudre à canon, qu’on tient éloignée du feu ; mais qui fera éclater ſa violence dès qu’on l’en approchera.