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trompé lui-même, & il ne connut le sentiment qu’il avoit pour cette charmante fille, que lorsque la mère lui demanda son avis sur un mariage qu’on lui proposoit ; elle ne lui en parla que comme le croyant assez de ses amis pour lui donner un conseil sincère. En effet, elle étoit bien éloignée de croire qu’il y dût prendre intérêt que par le seul avantage de sa fille. Il n’avoit marqué pour elle que ce qu’un homme galant fait paroître en général pour le beau sexe. Elle n’avoit que fort peu de bien à lui donner, & elle savoit que le cavalier étoit très-riche. Outre une fort belle terre dont il jouissoit, il avoit pour plus de cent mille écus de prétentions bien fondées, & il n’étoit venu à Batavie que pour recouvrer des pièces qui lui étoient nécessaires pour en assurer l’effet. Il parut embarrassé sur le conseil qu’on lui demandoit. Il s’informa du bien de l’amant, & le trouvant médiocre, il dit qu’avec du mérite, de la jeunesse, & de la beauté, il n’y avoit rien qu’on ne dût attendre, quand on pouvoit ne se pas hâter de faire un choix.

Le lendemain, il pria la fille de ne lui point déguiser si elle sentoit son cœur porté à ce mariage. Elle ne fit point difficulté de lui avouer qu’ayant besoin de quelque établissement pour réparer son peu de fortune, cette seule vue l’engageoit à écouter les propositions qui étoient