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ours le prince Solocule, qui se sentoit presque consolé de n’avoir plus l’oeil qu’il avoit eu en propriété, en ayant deux d’emprunt dont il se servoit. Rien ne paroissoit devant lui qu’il ne le connût, comme s’il l’avoit vu lui-même. Sa vielle l’amusoit infiniment ; & quand Prenany lui chantoit un air en le solfiant, il jouoit sur la musique ; il excelloit aussi au trictrac ; Prenany lui nommoit les dez, lui disoit combien il gagnoit de points, & quelle case il falloit faire : avec cela, il plaçait ses dames à merveille.

Mais comme personne n’est borné dans ses désirs, il vint un jour un regret à Solocule, ce fut de ne pouvoir voyager. Je sais, dit-il à la princesse sa mere, tout ce qui est dans ce palais & dans ces jardins ; je connois tous les objets qui s’y présentent, & tout ce que l’on y apporte, mais je n’ai nulle connaissance des pays étrangers : je voudrois y aller, & Plenany m’expliqueront ce qui y est. Acariasta tâche de lui faire comprendre les dangers d’une pareille entreprise ; mais il insista si fort, & parut si triste de ce que la princesse ne vouloir pas qu’il satisfît son envie, qu’elle fut prête à lui accorder sa demande.

Une des confidences d’Acariasta, qui avoit élevé Solocule, trouva un moyen pour satisfaire ce prince sans danger. Quand vous iriez