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m’a fait connoître que je ne m’étois pas trompé.

Après cet examen, je revins au fruit dont j’ai parlé : j’avois faim, & ſa liqueur avoit réveillé mon appétit. J’avois envie d’eſſayer ſi ce fruit étoit auſſi bon que ſa couleur & que ſon jus le promettoient : j’en mangeai avec plaiſir, & je trouvai ſon goût ſemblable au pain de riz que nous faiſons dans nos contrées. Jugez, ô reine, de ma joie : car enfin qu’est-il de plus vif que de pouvoir conſerver ſes jours ? Muni d’une demi-douzaine de ces fruits, j’allois quitter cet arbre admirable, pour retourner à la demeure où nous ſommes, que j’avois déja choiſie, lorſque je vis ſortir les poules par le trou que j’avois laiſſé ouvert. Je m’approchai doucement d’elles : mon abord ne les effraya point, & j’en pris une ſans réſiſtance ; je la flattai, & ſa douceur fut extrême. Je fus au rocher chargé de mon riche butin, en faiſant mille réflexions conſolantes ſur les acquiſitions que je venois de faire. Que vous dirai-je enfin, grande princeſſe ? Avec le tems & du travail je me ſuis peu-à-peu habitué à cette demeure ſouterreine. Mon fruit deſſéché, s’eſt trouvé une farine toute moulue, avec laquelle je fais du pain. L’obſcurité de la nuit m’a découvert de l’autre côté du rocher, un feu de bitume, qui