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cet objet ſi touchant : laiſſez-moi la conſolation de périr avec cet enfant chéri. Reine barbare, que t’avois-je fait pour me frapper de ſi cruels coups ? Et vous, ô mon fils, continua-t-elle en me regardant avec des yeux noyés de larmes, le ciel n’aura-t-il pas pitié de votre jeuneſſe ? Ô Sérapis ! ô ſort affreux ! faut-il périr tout vivant !

Haronza mourut le quatrième jour de foibleſſe. On n’avoit plus de larmes à verſer ; le déſeſpoir les avoit taries ; un ſilence affreux lui avoit ſuccédé : Lamékis ſeul paroiſſoit tranquillement attendre la fin de cette horrible tragédie ; la nourrice de ma petite ſœur, preſſée d’une faim dévorante, s’étoit jettée ſur la fille d’Haronza qui ſe mouroit, & vouloit la manger de rage. Lamékis à cet aſpect jetta un cri douloureux, & tendit vainement les bras pour arrêter ce deſſein criminel. L’horreur que j’en eus moi-même, me fit ſauter ſur cette femme, & lui enlever ſa proie. Je portai des marques de ſa fureur ; ſes dents meurtrières m’arrachèrent un morceau de chair de la main, elle la dévora comme une furie à nos yeux ; & la douleur que j’en reſſentis, me fit jetter des hurlemens affreux & continuels.

Ce nouveau malheur cependant ſauva la vie à la fille d’Haronza ; elle étoit ſur ma mère, la-