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fussions pas apperçus, nous trouvâmes que leur nombre étoit fort augmenté, & qu’ils étoient du moins quatre-vingt cavaliers parmi, lesquels nous crûmes remarquer quelques femmes.

Ils n’étoient éloignés de nous que d’une demi-portée de fusil, quand nous tirâmes un seul coup sans balle, en leur criant en même tems, en langue russienne, ce qu’ils vouloient, & qu’ils eussent à se retirer. Comme ils ne nous entendoient pas, ce coup ne fit que redoubler leur fureur. Ils avancèrent à toute bride du côté du bois, sans s’imaginer que nous nous y fussions si bien barricadés, qu’il étoit absolument impossible de s’y faire un passage. Notre Portugais, qui avoit été notre ingénieur, étoit aussi notre capitaine. Il nous pria de ne faire feu que lorsque nous verrions l’ennemi à la demi-portée du pistolet, afin que nous fussions sûrs de nos coups. Nous lui dîmes de nous en donner le signal, & il tarda si long-tems, que quelques-uns des ennemis n’étoient éloignés de nous que de la longueur de deux piques quand nous fimes notre décharge.

Nous vidâmes si juste, ou pour mieux dire, la providence dirigea si bien nos coups, que nous en tuâmes quatorze, sans compter les chevaux, & ceux qui n’étoient que blessés ; car nous avions tous chargé nos armes de deux ou trois balles tout au moins.